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6 juillet 2016 3 06 /07 /juillet /2016 08:26



Le temps, une notion qui compte oui.
Le rôle des horloges, des réveils, des plannings, des agendas ?
Avec des rides en plus.
Et maintenant je vais regarder ailleurs. Vers une mesure du temps autrement différente. Qui sert plus à grand chose...
( Rita, maquilleuse )


Lors d'animation de stages de préparation à la retraite, j'ai constaté la prédominance de représentations négatives liées au passage à la retraite. Au premier plan, l'inquiétude pour la santé, puis le vide relationnel, la vie de couple qui marquaient à leur tour la tendance.

L'âge, l'approche de la vieillesse et de la maladie assombrissaient l'éclat d'une nouvelle tranche de vie. Tout comme la perspective de la solitude, de l'isolement, du manque de contacts humains constituait l'obstacle incontournable à un épanouissement tant désiré.

Cette peur est en partie justifiée, car dans cette projection pénible de la retraite, personne ne possède aucune prise sur son mode de relations à venir, sa santé. De cette perception, le futur retraité voit souvent juste. Il sait qu'il manquera de l'énergie physique et psychique nécessaire à vouloir reconquérir le monde comme il le faisait à vingt ans. L'amère acceptation de cette nouvelle réalité, en tant que retraite ombragée semble douloureuse à penser et à vivre.
Il se voit bientôt précipité à la lisière d'un continent étroit, peuplé d'hommes et de femmes aux allures hésitantes, pesantes et ralenties. Alors que lui se sent encore tellement jeune! Il redoute d'appartenir sans délai à ce monde de retraités, peuplé de formes humaines avachies, la disparition de ses amis proches, son entrée inévitable en maison de retraite.
A ce sujet, la perception qu'un nouveau pensionnaire a de lui-même, quand il pénètre en maison de retraite à l'égard des autres est significative. Un regard de plus jeune porté envers ses semblables. A titre d'exemple, une personne âgée de 87 ans fit cette étonnante réflexion dans les quelques jours qui suivirent son installation en maison de retraite: "mais ils sont tous vieux ! " Elle refusait de s'associer à cette population qui la renvoyait à une insupportable vérité, celle du vieillissement et de la limite.

L'idée de la retraite peut avoir, pour certains, non pas le goût du miel, mais du pain dur. Comment en sortir ? Comment échapper à cette peur de la retraite, vécue comme une antichambre de la finitude ?

Le conteur Nahman de Bretzlev (mort en 1810) disait déjà en son temps "il est interdit d'être vieux". Qu'est-ce que cet impératif implique et appelle comme réflexions?

Par là il ne voulait pas dire qu'il est interdit de vieillir, mais qu'il faut toujours garder les yeux grands ouverts, rester perméable à la possibilité de la nouveauté, de la découverte, des apprentissages, de remise en question. Infléchir par-dessus toutes pressions de l'inertie un mouvement ascendant de la pensée et de l'action.
Rester hautement vivant par le refus de construire une image figée de sa retraite. Cela doit être une ouverture permanente à la nouveauté, à son propre désir comme au désir de l'autre, au changement.
Le retraité, loin de s'enliser dans un sommeil profond, opère une veille attentive à ce qui l'entoure, le mobilise, le questionne. Il ne cesse d'être vivant, encore et toujours jusqu'à son dernier souffle. Mourir, c'est la seule chose dont il ne soit pas le maître. Accepter cette idée de l'inévitable mort le conduira naturellement à profiter (sans peur) du cadeau temporel qui lui est offert, sans avoir le souci de gagner sa vie.

Insidieusement la peur de la retraite fait fuir, épuise et oblige à se terrer, faire le mort.pour se protéger de ses fausses croyances, de ses propres idées obsessionnelles sur son statut, sa représentation étroite du monde.


Le droit à la retraite ne s'apparente pas à une mort annoncée, mais au contraire à une vie retrouvée et attendue dont il faut affirmer toute la puissance et la force par une lutte avec soi-même.
Pourquoi ce combat ? De manière insidieuse, la peur de la retraite fait fuir, épuise et oblige à se terrer, faire le mort afin de se protéger de l'inéluctable et insupportable vérité, celle de son impuissance face au temps qui s'écoule et qui rapproche chacun de sa disparition. Moments difficiles à vivre, qui n'épargnent personne, sauf ceux dont l'aveuglante clarté de ces moments ne les conduisent à la mascarade. Les masques prennent alors les couleurs du bon manger, bien boire, bien fumer, bien...

Cette peur, si elle persiste dans la psyché du retraité et empêche, de ce fait, toute expression de son épanouissement, peut être analysée, comprise et entendue par des proches ou un autre que soi.
La personne souffrant d'une perte de sens en relation directe avec une mise à la retraite suite à une cessation d'une activité professionnelle peut s'adresser alors à un accompagnateur formé à ce type de démarche (coach de vie, psychologue, aidant) qui facilitera un tel passage.

MNorbert zerah
Psychologue clinicien

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