Une peur venue de si loin !

Aude est d’origine aristocratique, portant à son nom une particule qui la rattache à l’ancienne noblesse française.

Elle consulte en EMDR pour soulager une émotion, une peur qui la terrorise, par laquelle elle craint de mourir.

Elle a été nommée, il y a peu de temps, sur un important poste de responsable de service. Sa nouvelle fonction l’a conduite à travailler aussi avec le CES (Comité Économique et Social) confié aux  délégués du personnel.

1er temps : lors du visionnage d’un documentaire, une forte émotion survient. Il s’agit de la période dramatique du 2 au 7 septembre 1792 retraçant une série d’exécutions sommaires : dans les prisons françaises, nombreux massacres d’aristocrates y sont perpétrés par les comités révolutionnaires de salut public.

Pour Aude, fortement troublée par les images et les commentaires qui lui sont associés, il est difficile de ne pas s’identifier à sa caste d’origine, les aristocrates.

2ème temps : alors qu’elle vient d’occuper son poste, l’un des membres de la direction, l’invite à rencontrer le « comité » pour affaires urgentes. Ce mot « comité » va immédiatement faire l’effet d’une bombe émotionnelle. Pour Aude, c’est l’effroi de la guillotine. Elle se sent à nouveau piégée dans le temps des révolutionnaires. Plus de 200 ans plus tard, ils en veulent à sa peau d’aristocrate. Cette rencontre avec les représentants du personnel est perçue comme quelque chose de terrifiant. Que voit-elle en eux ? les sans-culottes qui en veulent aux aristocrates, cette caste dont elle fait partie ? Qui les méprisent, les assassinent et les conduisent à la guillotine ? Quand Aude est convoquée pour parler avec la délégation, c’est comme si on la conduisait à l’échafaud.

Il y a, pour la patiente, un inconscient transgénérationnel à l’œuvre dans cette angoisse, cette peur irrépressible de se confronter aux membres du CES de l’entreprise. Comment en sortir ?

C’est Aude qui va trouver la solution en s’appuyant sur le rôle des aristocrates dans l’histoire. Ils sont des maîtres certes, mais aussi protecteurs de leurs sujets. Nous invitons alors la patiente à endosser ce statut de « protectrice » au sens où il lui faut « protéger » les salariés, en toute sécurité,  dans le cadre du code du travail.

Le conflit de classes sociales est écarté par ce renversement de position. C’est la perspective d’une dimension consensuelle avec la délégation qui, à présent, occupe le terrain. La peur ainsi n’a plus sa place ni raison d’être.

Nous renforçons cette nouvelle posture par un balayage oculaire propre à la thérapie EMDR.

Les signaux déclencheurs sont présents dans notre quotidien. Ils nous ramènent, par leur diversité - images, sons, paroles, odeurs, saveurs, sensations.. - vers des émotions du passé dont les effets sont parfois d’une violence inouïe. Sachons les identifier et les retraiter avec le plus grand soin pour notre santé psychique.

Norbert Zerah

Psychologue clinicien